Salomon fait son vrai retour dans le ski de rando

Shinto : la voie des dieux

Topo : Les bonnes excuses – Massif des Essoufflés

Il y a maintenant 7 ans, Salomon débarquait dans l’univers du ski de rando avec une gamme complète (de la tête aux pieds) dénommée MTN. Depuis, peu d’évolutions majeures si ce n’est l’arrivée du Minim et du X-Alps, des skis orientés respectivement compétition de ski-alpi et « montagne fast & light ». Bien sûr, il y avait eu la Shift, fixation d’un nouveau genre mi-freerando / mi-alpine, mais côté ski touring pur, pas grand chose.

Un septennat plus tard, les gammes de produits ont bien évolué dans l’industrie du ski de rando, et le retour de réelles innovations de la part de la marque annécienne se faisaient attendre. En ce milieu d’hiver 2021-22, Salomon nous a invité aux Ménuires pour la présentation de sa nouvelle gamme rando, dénommée… MTN 2.0. Et on peut dire qu’il y avait matière à découvrir. Présentation.

UN POSITIONNEMENT 2.0 POUR LA MARQUE

Jusqu’à maintenant, la position de Salomon sur le marché ski de rando était largement identifiée à sa gamme MTN 88 et 95, puis aux QST utilisés par les athlètes du team, donc plutôt « ski de rando orienté descente », voire freerando. Si le succès de ces produits sur le marché est incontestable, il faut bien avouer que ces sept années ont pu paraitre bien longues pour certains fans de la marque…

Plus dommageable pour eux, les concurrents n’ont pas attendu leur reste pour prendre leurs distances avec de régulières nouveautés produits.

Si le temps de maturation du projet « touring » a pris du temps chez Salomon, c’est peut-être aussi pour mieux analyser le marché international, mieux le comprendre et, au final, proposer une gamme a priori plus en phase avec la réalité de la demande. Ce temps d’analyse, décrit comme nécessaire par Quentin Boutry, chef de produits de la gamme « free » chez Salomon (comprenez freeski, freerando et ski de rando), leur permet donc de revenir pour l’hiver 22-23 avec une double ambition : être au même niveau que leurs meilleurs concurrents à la montée, mais aussi différenciants à la descente en proposant tout simplement les meilleurs produits.

« Salomon revient fort dans le ski touring avec une nouvelle gamme de skis et de chaussures » nous confiait Quentin. Mais d’ajouter, « la dimension éco-responsable était essentielle à nos yeux dans la conception de cette gamme ». Concevoir un produit éco-responsable est malheureusement plus complexe à produire en série qu’un produit « classique » et l’industrie n’est pas encore tout à fait prête pour répondre à ces enjeux. Le contexte Covid et la prise en compte de cette dimension ont engendré pas mal d’inertie pour avoir une gamme prête à être commercialisée.

Des skis de rando adaptés à une grande partie du marché, au top à la montée et différenciants à la descente, tout en étant conçus de manière éco-responsable, il faut reconnaitre que l’ambition a de quoi séduire sur le papier… Alors sans plus tarder, voici ce que Salomon a préparé pour vous !

SKIS : LE SKI DE RANDO « TRADITIONNEL » VERSION MODERNE

Pour ce nouveau millésime, Salomon propose deux gammes différentes : la gamme MTN PRO, destinée aux nouveaux entrants dans la pratique, et la gamme MTN CARBON, avec des largeurs de 80 à 96mm sous le pied.

Si la gamme Pro poursuit l’objectif de produits faciles à prendre en main, notamment destinée au marché de la location, sa construction hybride paulownia/peuplier, en fait déjà un produit assez abouti. Elle se compose d’un 86mm au patin décliné en version homme et femme, ainsi que d’un 80mm (unisexe).

Toutefois, si vous lisez ces lignes, on imagine aisément que la gamme MTN CARBON éveillera encore davantage votre intérêt !

Trois modèles composent cette nouvelle lignée (80, 86 et 96mm au patin). Et si l’objectif de Salomon était d’avoir la meilleure skiabilité tout en cherchant à être le plus efficace possible à la montée, on peut dire qu’ils n’y sont pas allés par quatre chemins !

La légèreté a été obtenue grâce à un énorme travail sur les matières autour d’un noyau full paulownia, avec un mix fibres de verre, fibres de carbone, fibres de basalt, nylon, et même du liège pour les spatules (hors mis sur le 80mm). A titre de comparaison, la balance affiche 150g de moins entre l’ancien MTN 95 et le nouveau MTN CARBON 96.

En termes de shape, Salomon est revenu sur un esprit plus athlétique, plus traditionnel. Exit le rocker, on est désormais sur un cambre plus plat. Cela a permis aux développeurs de revenir sur des tailles de skis moins grandes, gage de légèreté. Malgré une longueur plus petite, cette absence de rocker ne détériore aucunement le contact ski-neige qui, sur le papier, semble au même niveau que ses prédécesseurs. A noter que la performance à la montée, élément-clé du cahier des charges de cette gamme MTN 2.0, a été travaillée sur l’équilibre du ski.

La création de ces nouveaux moules a été prévue pour les déclinaisons suivantes :

96mm : 166, 174, 182cm (158cm à venir l’année prochaine).

86mm : 156, 172, 180cm

80mm : 158, 164, 170cm

Et les peaux de phoque dans tout ça ? Comme bon nombre de fabricants, Salomon commercialisera ses skis avec des peaux spécifiques. Développées avec Coll-Tex, elles seront 65% mohair – 35% synthétique, avec un traitement « dry » pour éviter le redouté « bottage ». Côté système d’accroche, il sera type « race » sur le 80 et le 86mm (accroche par élastique dans l’encoche prévue sur la spatule. Pour le 96mm, ce sera un système d’encoche plus standard avec tendeur au talon.

L’ÉCO-RESPONSABILITE AU CENTRE DE LA RÉFLEXION

Selon les dires de Quentin Boutry, « la marque s’est rendu compte que 50 à 60% de l’impact carbone d’un ski venait des matières. Il a donc fallu travailler énormément sur cet aspect. En effet, nous voulions que la réflexion autour de cette gamme de ski de rando soit la plus poussée possible sur l’éco-responsabilité sans dégrader la qualité du ski. Cette démarche nous a confronté à une problématique majeure : l’industrie du ski n’est pas encore prête à répondre efficacement à ces enjeux. Beaucoup de process sont à créer, et s’engager dans cette démarche a forcément impliqué beaucoup de R&D, consommatrice de temps ».

Ainsi, si 100% des skis sont fabriqués en Europe (Altenmark, Autriche) et 90% des matières du ski viennent également d’Europe, le premier enjeu à consider a été le bois – paulownia majoritairement – qui vient de Chine, car il est très complexe de se sourcer en Europe.

Pour répondre à cette problématique, Salomon a décidé de ne travailler qu’avec des bois certifiés quant à leur provenance et issus de forêts gérées de manière durable.

Pour pousser la démarche « eco-friendly », l’un de leurs challenges a été de réutiliser tous les déchets liés à la production. C’est ainsi qu’est née l’idée d’une semelle de ski 100% recyclée. Pour cela, tous les déchets de production de la semelle d’autres gammes de skis sont récupérés pour ensuite être « re-grindés ». Cela donne un effet « moucheté » à la semelle au look un peu rétro, mais plutôt singulier.

Petit revers de médaille, cette semelle recyclée a un « potentiel de blanchiment » un peu plus élevé que la moyenne. Pour palier à ça, Salomon a travaillé avec Vola pour développer une wax spécifique. Offert avec la paire de skis, ce pain de fart devra être appliqué au bout de 2 à 3 sorties afin de nourrir la semelle et de conserver ses propriétés de glisse. Rassurez-vous, au-delà de ce premier « entretien », la fréquence de fartage redeviendra « normale ».

Le « top sheet » est, lui, composé de 30% d’éléments recyclés. C’est un pourcentage modeste, mais Salomon s’en justifie par le fait que « aller plus loin dans le sourcing de matières recyclées aurait dégradé la durabilité du ski, ce qui est un peu antinomique avec cette démarche d’éco-responsabilité ». A cet égard, la marque souhaitait un « top sheet » hyper solide, car c’est souvent l’aspect visuel du ski qui motive le consommateur à renouveler son matériel. Les skis ont ainsi été conçus avec des chanfreins toute longueur, permettant d’aplatir le champ. Cela rend le ski plus résistant aux coups de carres et donc plus durable dans le temps.

DE NOUVEAUX MOULES DE CHAUSSURES POUR COMPLÉTER L’OFFRE

Marqueur fort du retour de Salomon dans le ski de randonnée et de leurs ambitions à long terme, la marque annécienne a également profité de ce lancement pour dévoiler une gamme complète de chaussures.

Revue de A à Z par rapport aux produits MTN existants, cette nouvelle plateforme « SUMMIT » entretient les mêmes ambitions que pour les skis, détaillées ci-dessus, être au niveau de ses meilleurs concurrents à la montée, et offrir une skiabilité au-dessus du lot à la descente !

Composée de 3 modèles, dont 2 déclinés en version femme et homme (PRO et PURE), cette gamme SUMMIT est résolument orientée « dénivelé » avec une liberté de mouvement à la montée de 75° (« range of motion » dans la langue de Shakespeare).

Côté poids, le modèle S-LAB MTN SUMMIT affiche 1kg sur la balance en taille 26, pour un flex d’environ 110 à 120 (bien que les chaussures de ski de rando ne soient pas vraiment normées sur cet indicateur). Côté technique, le collier de la chaussure utilise une matière carbone hybride similaire à celle utilisée sur la fixation Shift.

Le serrage par scratch du collier est associé à une « touring belt » réglable par un Boa® pour assurer un maintien optimal du pied dans la coque. Cette « touring belt » est une sangle qui permet de bloquer le talon au fond de la chaussure.

Ce serrage offre deux avantages, une skiabilité très intéressante, et une réduction des frictions à l’intérieur de la chaussure à la montée. Les personnes sensibles aux problèmes d’ampoules apprécieront.

A ce propos, les chaussons sont « MyCustomShell® » donc 100% thermoformable.

Le débrayage de la chaussure, quant à lui, est un système ski-walk horizontal, assez cher à Salomon. Selon leurs arguments, à la différence des systèmes à levier, ce mécanisme ne verrouille pas le flex et ne crée donc pas de point dur à la descente.

Pour terminer ce tour d’horizon des attributs de cette gamme SUMMMIT, la semelle extérieure a été développée en collaboration étroite avec l’équipe « footwear trail » de Salomon, afin d’optimiser les connaissances et brevets sur la forme des crampons, le choix de la gomme, etc.

Côté éco-responsabilité enfin, cette gamme de chaussures se veut également durable. La semelle de la chaussure est faite avec 50% de matière recyclée. Les semelles sont ressemelables si besoin. Le « liner » utilise des tissus recyclés et le plastique de la coque est bio-sourcé.

LES SENSATIONS SUR LE TERRAIN

Allez, assez parlé technique et arguments marketing, parlons vrai !

Si notre test du jour n’a duré que quelques heures et que nous n’avons testé qu’un seul modèle, le MTN CARBON 96, on peut s’aventurer à vous dire que cette gamme semble très bien née. Que ce soit sur une fine couche de poudre avec sous-couche béton en dessous, sur piste damée, voire en trafole, ces skis sont un régal à tourner.

Bien que ça ne soit pas du tout le programme premier de ce modèle, nous avons été bluffé par l’accroche sur piste. Sur une neige dure et même sur de la glace, ça tient sur la carre de manière impressionnante.

La prise en main avec ce ski est très facile et on se sent tout de suite en confiance. Que l’on cherche à skier fort ou, au contraire, enchainer les virages à vitesse modérée, ce MTN CARBON 96 est surprenant.

Nous ne pourrons vous en dire plus sur les capacités à la montée car notre section en dénivelé positif a été plutôt courte et à pente modérée, mais le ressenti a priori était, là aussi, assez positif.

CONCLUSION

Avec cette gamme MTN 2.0, Salomon signe donc son grand retour dans le ski de rando avec une offre très complète et, à première vue, bien adaptée au marché européen. La prise en compte de l’enjeu « éco-responsabilité » dans le cahier des charges apporte(ra) ce supplément d’âme, qui commence à prendre de l’ampleur dans leur centre de conception de « l’Annecy Design Center ». Même si Salomon est loin d’être le seul ou encore le premier, à intégrer cette dimension dans leur réflexion sur les nouveaux produits, on peut se réjouir que cela commence à s’imposer de manière générale dans l’industrie. Il semblerait d’ailleurs que les procédés et enseignements acquis dans le cadre de cette gamme tendront à s’appliquer rapidement sur leurs gammes skis alpin, etc.

Du côté de la freerando, si ce repositionnement sur un créneau plus « core » du ski de rando est une nouveauté pour Salomon, ils n’en n’oublient pas pour autant leur clientèle amatrice de « 100+ mm sous le pied ». Il semblerait, en effet, que des skis d’environ 106mm seront dévoilés l’hiver prochain, via le label QST. Affaire à suivre, notamment sur leurs réseaux sociaux où on peut déjà avoir un aperçu de la gamme MTN 2.0.

Et tant que l’on parle de l’an prochain, sachez que Salomon annonce d’ores et déjà l’arrivée d’une nouvelle fixation à inserts… De quoi finaliser leur offre « de la tête aux pieds ».